Les Multiples Vies d’Orsay

orsay1Je vous parlais, il y a peu, des charmes de la Belle Epoque que l’on peut retrouver sous les traits du restaurant Lasserre, près des Champs Elysées. Cependant, amateur de belle forge, vous désirez plus de spectacle dans ce domaine ? Prenons alors quelques instants pour vous parlez du Musée d’Orsay. Enfin plutôt d’Orsay, puisque nous allons savourer ensemble la qualité filmique de ce bâtiment, à travers les différentes étapes de sa vie mouvementée.

Le bâtiment en question fut érigé sur les fondations calcinées du Palais d’Orsay et de la caserne de cavalerie. Sans le savoir, les communards avaient déblayé le terrain pour la construction de la gare d’Orsay. L’état céda ensuite à la Compagnie des chemins de fer de Paris à Orléans la sombre parcelle, celle-ci devant lui permettre de terminer sa voie ferrée en position plus centrale dans Paris. A l’époque, les compagnies concurrentes ne communiquent pas entre elles, et chaque gare parisienne est un terminus. L’audace architecturale de la gare doit donc attester de la prospérité de ses constructeurs. Les arguments ne manquent pas pour aiguiller la construction de la gare en direction d’un chef d’œuvre de style.

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D’abord, elle se doit d’être plus chic que la gare d’Austerlitz, bien trop décentrée. Ensuite, elle doit accueillir les visiteurs de l’Exposition Universelle de Paris en 1900, ainsi que les délégations étrangères. Les rails de la raison politique et diplomatique amènent donc son créateur, l’architecte Victor Laloux, à l’édifier selon les canons triomphants du « bon goût » et de l’académisme des temps modernes. Il opte alors pour une bâtisse toute de verre et de métal, dont la structure reste une définition pour les amateurs de « style de l’époque ». Il insère ensuite ce joyau dans un écrin fait d’un parement de pierres ornées, et de trois statues, représentant les trois villes desservies par la compagnie.

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Gare d’Orsay au début du XXème siècle – The Gare d’Orsay at the beginning of the 20th century

Le décor planté, les caméras peuvent entrer en action. Et la gare, (ainsi que l’hôtel qu’elle comporte) se transforme en comédienne. Elle interprétera un rôle de composition dans le l’adaptation du de Kafka, sous la direction d’Orson Welles. Elle incarnera aussi un rôle social, en étant métamorphosée en vide grenier, pour « l’opération débarras », d’après un scénario de l’Abbé Pierre. Elle se fera saltimbanque, théâtre d’un théâtre, pour les productions de  et de ses amis Nietzsche, Voltaire, ou Paul Claudel. Elle deviendra luxueuse, et déjà amatrice d’art, pour l’. Convertie à sa vocation nouvelle, la gare se fit musée à partir de 1986, abritant en son sein des merveilles dignes de ses charmes : les œuvres de Rodin, Manet et Cézanne ponctuent la galanterie de son hospitalité. Et donnant ainsi raison au peintre Edouard Detaille, qui prononçait un siècle plus tôt : « la gare est superbe et a l’air d’un Palais des Beaux-Arts… ».

Le décor planté, les caméras peuvent entrer en action. Et la gare, (ainsi que l’hôtel qu’elle comporte) se transforme en comédienne. Elle interprétera un rôle de composition dans le l’adaptation du Procès de Kafka, sous la direction d’Orson Welles. Elle incarnera aussi un rôle social, en étant métamorphosée en vide grenier, pour « l’opération débarras », d’après un scénario de l’Abbé Pierre. Elle se fera saltimbanque, théâtre d’un théâtre, pour les productions de Jean-Louis Barrault et de ses amis Nietzsche, Voltaire, ou Paul Claudel. Elle deviendra luxueuse, et déjà amatrice d’art, pour l’Hôtel Drouot. Convertie à sa vocation nouvelle, la gare se fit musée à partir de 1986, abritant en son sein des merveilles dignes de ses charmes : les œuvres de Rodin, Manet et Cézanne ponctuent la galanterie de son hospitalité. Et donnant ainsi raison au peintre Edouard Detaille, qui prononçait un siècle plus tôt : « la gare est superbe et a l’air d’un Palais des Beaux-Arts… ».

La France garde ainsi un diamant de son architecture industrielle, et honore la mémoire des défuntes Halles de Baltard.

The many lives of the Musée d’Orsay:
Not long ago, I told you about the Belle Epoque charm to be found at the restaurant Lasserre near the Champs Elysées. What then, I hear you cry, if all you really want to see is a spectacular masterpiece of metalwork? Allow me to tell you a little about the Musée d’Orsay.
Or rather, Orsay in all its guises, because this building has been through so many transformations in its turbulent, cinematic life that it would be a shame not to savour it in its entirety. When the Communards burnt down the Palais d’Orsay and the cavalry barracks, they had no idea they were priming the ground for the construction of the Gare d’Orsay. The state handed over the scorched, sombre plot to the Compagnie des Chemins de Fer de Paris à Orléans to provide the company with a more central location for the Paris terminus of its railway line. At the time, the companies did not work together, and each of Paris’s railway stations was a terminus whose audacious architecture served to show off its constructor’s prosperity. Arguments were rife as the company endeavoured to conduct the construction of a stylish masterpiece. Most importantly, it had to be classier than the Gare d’Austerlitz, which was too far from the city centre. Secondly, it had to welcome the visitors to Paris’s Exposition Universelle of 1900 as well as the foreign delegations. For these reasons, the architect Victor Laloux decided to stay on the rails of political and diplomatic reason and build according to the triumphant ideals of “good taste” and the established ideas of the modern academy. He opted for a building made entirely of glass and metal, whose structure remains a reference for anyone interested in the style of the period. He then set this jewel in a fitting case: a facing of embellished stones, plus three statues representing the three cities served by the railway company.
Now the scene was set, the cameras could start rolling. And the station (along with its hotel) turned into an actor. It played a major role with a character of its own in Orson Welles’s adaptation of Kafka’s The Trial. It also took on a social role when it underwent a metamorphosis into a great car boot sale for “operation clear-out” following Abbé Pierre’s plea to aid the city’s poor. The building would play an acrobat, a theatre within a theatre, for productions by Jean-Louis Barrault and his friends Nietzsche, Voltaire and Paul Claudel.
Already steeped in art and culture, it would become luxurious for L’Hotel Drouot. Converted to its new vocation, the station was made into a museum in 1986, housing marvels worthy of its beauty: its gallant hospitality is rewarded with works by Rodin, Manet and Cézanne. It looks like painter the Edouard Detaille was right when, a century earlier, he declared “the station is superb; it looks like a museum of fine arts…”.
France has thus preserved a jewel of its industrial architecture and honours the memory of the former Halles de Baltard.

Didier MOINEL DELALANDE

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