Du 14 au 29 juin 2010, l’Opéra Comique proposait, pour fermer sa saison, Pelléas et Mélisande, drame lyrique de Claude Debussy. Fait rarissime pour un compositeur, Debussy en écrivit lui-même le livret d’après une pièce de Maeterlinck. La première représentation eut lieu le 30 avril 1902… à l’Opéra comique. Je vous dis cela, parce que Claude Debussy est un des compositeurs majeurs de l’histoire de la musique occidentale, même si sa notoriété, dans le grand public tout au moins, n’atteint pas celle de Bach, Mozart ou Beethoven. Ensuite, parce que Pelléas et Mélisande est une œuvre charnière dans l’évolution de la musique du XIX / XX° siècle. Enfin, parce que… cela me permet de vous dire deux mots sur cette institution fort mal connue qu’est l’Opéra Comique de Paris inscrite depuis 2005 sur la liste des théâtres nationaux.
Il a été fondé sous le règne de Louis XIV pour permettre à des troupes « foraines » de présenter des pantomimes et des parodies d’Opéra qui avaient le don de mettre en rage la Comédie Française qui leur faisait, par conséquent, moult procès. Pour avoir la paix, le roi soleil leur donna une salle (l’Opéra Comique) et leur demanda de se tenir tranquille en ce lieu. C’est de cette volonté royale (particulièrement Ponce Pilate !) que vient le nom d’Opéra Comique. L’ambiguïté sémantique du nom nuit, certainement, à l’institution qui n’a pas du tout, depuis, la vocation de présenter des… œuvres comiques. Le principe de base est de présenter des œuvres où les scènes chantées alternent avec des dialogues parlés, contrairement à l’opéra où toute la partition est chantée (chants pleins ou arii).
Quant au bâtiment, chacun aura son point de vue. Pour ma part, même si je reconnais des intentions architecturales intéressantes (jeux de courbes, fenêtres monumentales, verticalité de l’ensemble), l’ensemble me laisse froid. Il me fait penser aux stucs lourds et surchargés de l’architecture préférée de la bourgeoise triomphante du XIX° siècle. Mais il m’arrive de trop céder à mon impériale subjectivité … A l’intérieur de cet opéra situé non loin de l’hôtel, place Boieldieu, dans le 2e arrondissement de Paris, la Salle Favart porte le nom de Charles-Simon Favart, fameux auteur de livrets d’opéra, victime de sons succès. Le succès de ses pièces est en effet tel dans les années 1740 qu’il fait ombrage aux autres théâtres parisiens et que, pour y remédier, les autorités de l’époque ferment le théâtre pendant 6 ans ! La salle a, elle aussi, connu bien des déboires : un incendie la détruit après une représentation de Don Giovanni de Mozart en 1838. Un deuxième incendie, plus théâtral, détruira la salle le 25 mai 1887 pendant une représentation de Mignon, opéra comique en trois actes d’Ambroise Thomas : Dans le second tableau du deuxième acte, Lothario met le feu au château pour venger Mignon du succès de Philine. La mise en scène, trop réaliste de cet incendie aura raison de la salle et coutera la vie à quatre-vingt-quatre personnes ! Après onze ans de travaux de reconstruction, la salle actuelle, d’une capacité de 1500 places environ, est inaugurée en décembre 1898 … une idée de visite pour les très prochaines journées européennes du patrimoine.
Enfin, pour revenir un instant sur Pelléas et Mélisande, on me dit que Maeterlinck mit plusieurs années à admettre que Claude Debussy avait réussi à en faire entendre, par sa musique, toute la part d’inexprimable vérité. Cela me confirme, mais je m’en doutais un peu, qu’entre les êtres humains, la vraie reconnaissance demande parfois de nombreuses années pour émerger jusqu’à sa juste place.
Opéra Comique
1, place Boieldieu
75002 Paris
Didier MOINEL DELALANDE