Comme j’aime à vous parler des bonnes choses de la vie sur ce blog, et de celles qui relèvent du goût le plus recherché, il serait regrettable de ne pas mentionner l’ortolan. Bien qu’il s’agisse désormais d’un sujet controversé, on ne saurait en faire l’impasse quand il s’agit de parler de tradition gastronomique de haut vol. L’ortolan est un petit oiseau chanteur, et un grand migrateur, capable de parcourir plus de 7000 kilomètres au cours de ses pérégrinations.
Réputé comme un noble met depuis le moyen âge, il est considéré comme un plat royal, d’une extrême délicatesse, ce qui n’est pas sans contraste avec la tradition de consommation peu coutumière dont il fait l’objet. Suite à un gavage naturel, généralement au millet blanc, il est d’usage de noyer l’ortolan dans l’armagnac. C’est la petite taille de l’oiseau qui provoque ensuite cette façon si particulière de le manger. En effet, le gourmet doit le mettre dans sa bouche et le laisser fondre, presque sans mâcher. La finesse du squelette permet de tout avaler, os et organes internes inclus. Le spectacle peut ragoutant du mangeur d’ortolan explique aussi la deuxième tradition propre à la dégustation de l’animal. La coutume voulait que l’on place une serviette sur sa tête, retombant par delà le front, afin de cacher son visage pendant que l’on mastique de façon disgracieuse. Plaisir solitaire et divin, l’ortolan savait séduire les papilles des plus grands. Par exemple, il constitua le dernier repas de réveillon de François Mitterrand. Le très grand Alain Ducasse affirme même, dans son « dictionnaire amoureux de la cuisine », qu’il faut « au moins une fois dans sa vie vouloir payer le prix de cette folie princière (…), pouvoir ranger parmi ses souvenirs gourmands la mémoire de cette dégustation où l’on ne fait que mâcher une boule de graisse suave et brûlante jusqu’à épuisement total de tous ses sucs de cuisson (…) ».
Si Alexandre Dumas pouvait en parler comme l’un de ses menus préférés, il en est tout autrement à notre époque. En effet, l’ortolan est désormais considéré comme une espèce rare et, de ce fait, protégée. Sa chasse en est interdite et de nombreuses associations de protections des animaux militent contre le marché noir au sein duquel cette pépite gustative s’achète à prix d’or. Il est donc désormais conseillé au gourmet de ne rêver uniquement d’un tel plat, et de ne pas franchir les limites de la légalité. Votre serviette de table ne saurait plus vous cacher de votre méfait, et vous devriez rendre des comptes.
Ortolan, an exceptional dish to avoid:
In this blog, I like telling you about the good things in life and especially those that suit the most refined tastes, so it would be a pity not to mention the ortolan bunting. It may spark heated debates these days, but there is no denying its importance in top level haute cuisine. The ortolan is a small songbird and a great traveller – it can cover up to 7,000km on its migrations.
Reputed as a noble dish since the Middle Ages, it is considered an exquisite delicacy fit for kings, which goes hand in hand with the unusual manner in which it is traditionally prepared and eaten. After force-feeding the ortolan by natural means, usually on white millet, it is customary to drown it in Armagnac. Its diminutive size has brought about a peculiar method when it comes to eating the bird. The diner must place it in his mouth and let it melt, almost without chewing. The skeleton is so fine that
the creature can be swallowed whole, bones and internal organs included. The somewhat unsavoury sight of the diner eating ortolan in this manner explains the second tradition attached to the dish. The old custom was to place a napkin over your head and forehead to hide your face whilst chewing in such an ungainly fashion.
A solitary divine pleasure at that time, the ortolan appealed to many discerning taste buds. It was François Mitterrand’s choice for his last New Year’s Eve meal, for example. Alain Ducasse, the highly esteemed chef, goes so far as to state in his “dictionnaire amoureux de la cuisine” that one ought to “give in and treat oneself to this princely folly at least once in one’s life (…), to be able to count amongst one’s most memorable meals the thought of sampling a dish that involves no more than chewing a smooth, burning ball of grease until its juices have run dry (…)”.
Although Alexandre Dumas was able to mention ortolan as one of his favourite dishes, this is no longer the case. Nowadays, the ortolan is listed as rare and is therefore a protected species. Hunting it is forbidden and many animal welfare groups campaign against the black market in which this tasty delicacy is traded like gold nuggets. So a word of advice to the epicures of today: better to stick with legal produce and resist the temptation to try this dish. Wearing a napkin over your face won’t be enough to save you from the long arm of the law, and you’ll have to face the consequences.
Didier MOINEL DELALANDE