Repartons un peu en vacances … Cet été, je me suis pris à me souvenir de la Guadeloupe, j’y ai déjà passé quelques séjours et ne suis pas très sûr de vouloir y retourner … d’ailleurs j’ai récemment laissé Charlotte s’y rendre toute seule retrouver des amis, peu attiré en fait par cette île.
Il s’y passe des évènements énigmatiques depuis janvier 2009. Ils n’incitent guère à l’optimisme quant à l’avenir de cet archipel composé de bouts de terre aux noms magnifiques de La Désirade, Les Saintes ou Marie Galante… Située à 6 200 km de Paris et 600 km des côtes de l’Amérique du Sud, La Guadeloupe, en créole Gwadloup, est un morceau de France piqué sur l’arc volcanique des Caraïbes au dessus d’une des failles tectoniques les plus dangereuses au monde. Avec sa sœur La Martinique, la Guadeloupe reste, évidemment, un lieu prisé de vacances d’hiver pour français plutôt aisés et frigorifiés. La nature y est luxuriante, les cieux somptueux, la température idéale grâce aux alizés. La mer est chaude, les infrastructures à peu près dignes de la mère patrie française. Enfin, les antillais sont gais, charmants, insouciants, grands danseurs devant l’Éternel et assez peu enclins aux efforts laborieux inconsidérés. Tour cela sent donc le paradis sur terre avec ses explosions de couleurs et de senteurs plus délicieuses les unes que les autres.
Et pourtant ! Pourquoi ce sentiment de malaise lorsque l’on passe quelques jours là-bas et que l’on en revient, certes réchauffé, mais perplexe? Je dirai, sans être grand spécialiste de tout cela, pour au moins trois raisons majeures et insidieuses. D’abord, le risque sismique. Il est absolument considérable. Les prévisions officielles tablent sur au moins 300 000 morts lors de la prochaine secousse sérieuse aux Antilles. Elle est inéluctable et aurait déjà dû se produire. Doublée d’un risque volcanique tout aussi ravageur, cette épée de Damoclès incite les antillais à un fatalisme palpable dès l’aéroport. Ensuite, les traces de l’esclavagisme restent prégnantes dans la mémoire des guadeloupéens (et des Martiniquais). Faut-il rappeler que plus de 10.000 bateaux quittèrent les ports de Nantes, La Rochelle et Bordeaux pour forfaire leur ignoble négoce négrier. Il y a quelques générations de cela. Ce n’est pas loin. On a peut-être oublié à Paris. Mais ni à Point à Pitre ni à Fort de France. Les braises de l’amertume couvent définitivement tant l’humiliation, la terreur et les souffrances furent incalculables. Le besoin vital d’émancipation est dans la tête de chaque guadeloupéen et s’exprimera, évidemment, un jour ou l’autre. Dans la douceur tropicale ou la violence sanglante. Enfin, troisième et dernière raison, le pronostic de flambées d’une jeunesse qui déborde de santé, de bonne humeur et d’ironie amère envers les bienfaits de la France. Tournant en rond faute de travail, elle reste suspendue, le 5 de chaque mois, aux paiements des RSA et autres subventions que lâche Paris pour avoir la paix avec ses îles turbulentes.
Voilà pourquoi, je ne suis pas sûr de vouloir retourner en Guadeloupe. J’attendrai que la situation s’éclaircisse et que mon séjour ne soit plus gâché, par exemple, par ces grèves incessantes qui figent l’économie locale dans une torpeur malsaine. Je comprends largement les motifs de ces interruptions de travail. Mais ce que je pressens, aussi, c’est que la Guadeloupe est en train de perdre son rendez-vous historique avec le tourisme. D’ailleurs, les charters virent d’ailes en direction de Saint Domingue ou de Cuba … Dommage !
Tremulous Guadeloupe
What if we were to go back on holiday for a bit…? This summer, I caught my mind wandering back to Guadeloupe, an island that I have visited a few times but am not completely certain that I want to return to… in fact I recently left Charlotte to go there without me to join some friends, simply because I am not very tempted by this destination.
Mysterious things have been happening there since January 2009 and sadly they do not incite much optimism for the future of this archipelago made up of chunks of land with lovely names such as La Désirade, Les Saintes and Marie Galante… Situated 6200km from Paris and 600km off the coast of South America, Guadeloupe (or Gwadloup in Creole) is a piece of France perched on a volcanic arch of the Caribbean above one of the most dangerous tectonic faults in the world. With its sister island of Martinique, Guadeloupe obviously remains a popular destination for a winter break for well-off French holidaymakers who want to escape the cold, and rightly so since it offers lush nature, clear blue skies, an ideal temperature thanks to the sea breeze, a warm sea and relatively good infrastructures. The local people are fun loving, charming, carefree, great dancers and rather disinclined to unreasonable laborious efforts. So all this sounds like paradise on earth with its bursts of colours and fragrances each more delicious than the next.
And yet…! Why this niggling feeling after spending a few days there and coming back warmed up, yes, but also perplexed? I would say, without being a great specialist on the subject, that there are at least three major and insidious reasons behind it. Firstly, the seismic risk. It is ominously huge. The official forecasts predict that there will be at least 300,000 deaths after the next big earthquake in the West Indies. It is ineluctable and by all accounts should already have happened. Doubled by an equally destructive volcanic risk, this sword of Damocles hanging over the population leads to a fatalism that is palpable the moment you arrive at the airport. Secondly, the traces of slavery remain lodged in the memories of the people of Guadeloupe (and Martinique for that matter). Need I remind you that over 10,000 ships left the ports of Nantes, La Rochelle and Bordeaux to carry out their terrible trade in human beings? And that was only a few generations ago. It is not far. We may have forgotten in Paris, but not in Point à Pitre nor in Fort de France. The still-hot ashes of bitterness will long continue to burn so incalculably great was the humiliation, terror and suffering that slavery caused. The vital need for emancipation is at the back of every person’s mind and will have to come out one day, whether in tropical gentleness or bloody violence. Finally, the third and last reason is the rising anger amongst a youth overflowing with health and good humour but also with a bitter irony in terms of what France does for them and their island. With no jobs to go to, the youngsters are left to their own devices and forced to depend on the benefits and other subsidies that Paris channels into these turbulent islands to buy a little time.
This is why I am not overly keen to go back to Guadeloupe. I prefer to wait for the situation to clear up and for a time when my trip will no longer be spoilt, for example, by these incessant strikes that entrench the local economy in an unhealthy torpor. At the same time I completely understand the reasons for these strikes. But what I sense is that Guadeloupe is in the process of losing its grip on its tourism ‘lifeboat’. The charter planes are changing direction and preferring to wing their way towards Dominican Republic and Cuba… What a shame!
Didier MOINEL DELALANDE